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Un grand garçon aux cheveux roux et aux reflets blonds
sanglotait assis sur une chaise. Sa peau avait rougi sous l'effet
de l'énervement et il n'hésitait pas à donner
deux ou trois coups de pieds dans la table pour calmer sa fureur.
Des larmes roulaient sur ses joues et allaient ensuite se poser
sur la table, formant des taches rondes et claires.
Il s'arrêta tout à coup. Une femme de petite taille
venait d'entrer dans la pièce. Elle était d'une
incroyable beauté : ses cheveux blonds étaient tirés
en arrière à l'exception d'une mèche qui
venait cacher un de ses beaux yeux vert émeraude. De longs
creux se trouvaient sur ses belles joues roses qui montraient
qu'elle aussi pleurait, ou du moins, qu'elle avait pleuré.
Sa robe bordeaux à mi-mollet et son tablier blanc étaient
couverts de terre et ses sabots bruns semblaient bien inconfortables.
Elle s'assit près de lui et lui dit :
« Voyons mon fils, que fais-tu ? Ce n'est pas le moment
de perdre espoir »
Son accent provençal fit réagir le jeune homme et
ses larges épaules se redressèrent.
Il dit alors :
« Mais mère, cela fait trois semaines qu'il aurait
dû revenir et nous n'avons aucune nouvelle de lui !
- Je sais mon enfant, mais peut-être qu'un message est entrain
de nous parvenir en ce moment même, un message de ton père
- Ou son certificat de mort !
- Jacques ! !
- Pardonne-moi maman, je ne sais pas ce qui m'a pris Excuse-moi.
- Ça va, mais ne t'avise pas de redire des choses de ce
genre Je sais bien que ton père est parti depuis bien trop
longtemps mais il doit être vivant sinon nous aurions déjà
reçu quelque chose. »
Charlotte, désespérée, quitte alors la pièce
sombre et passe dans une pièce claire où elle prie
jusqu'à l'aube. Un mois auparavant, la vie de Jacques et
de ses parents, Charlotte et Guy Sougré, était paisible
et heureuse. Jacques et Charlotte récoltaient, coupaient
et épluchaient les céréales de leur champs
et Guy, grâce à son bateau, Le Pèlerin,
allait les vendre en Sicile. Leurs vies de marchands à
Marseille étaient tranquilles. Un beau jour de mai, Guy
embarqua trois cent sacs de blé et partit les vendre en
Sicile, à son habitude. Avant son départ, il avait
prévenu sa famille qu'il ne reviendrait pas avant deux
semaines. Après trois semaines sans nouvelles, Charlotte
et Jacques apprirent que des pirates Turcs rodaient sur les côtes
de la Méditerranée et qu'un navire appelé
Le Pèlerin avait été attaqué
et pillé. Les personnes à bord avaient été
faites prisonnières sur le navire des barbares et emmenées
on ne sait où vers l'Aquitaine. Horrifiés, Charlotte
et Jacques étaient restés impuissants devant le
malheur de Guy.
Le lendemain, Charlotte, qui comme chaque matin allait chercher
des nouvelles sur les captifs, entendit dire que sa voisine, mariée
à un des captifs tout comme elle, allait en pèlerinage
à Saint Jacques de Compostelle pour demander grâce
à Dieu.
Une fois chez elle, Charlotte pensa à son mari et à
sa foi religieuse qui pourrait peut-être sauver Guy. Tout
à coup, un grincement interrompit ses pensées. C'était
Jacques qui rentrait de la grande place, où il se rendait
tous les jours chercher des nouvelles. Charlotte lui dit alors
:
« Jacques, sais tu que notre voisine, Camille, va en pèlerinage
dès demain pour demander grâce à Dieu pour
son mari qui, comme tu le sais, était aussi à bord
du Pèlerin ? »
Jacques, qui voyait où sa mère voulait en venir,
lui dit :
« Maman, j'ai entendu parler de ses projets et je comprends
que tu veuilles faire de même, mais ne crois-tu pas que
nous devrions penser à ce que les champs deviendraient
sans nous à la ferme
- Justement, j'y ai pensé et je me suis dit que nous pourrions
les confier à ta tante Sophie. Elle a toujours été
très bonne avec toi et je suis sûre qu'elle accepterait.
- Oui, probablement mais comment fera-t-elle toute seule dans
les champs ?
- Tu oublies qu'elle s'est récemment remariée et
que son mari était aussi fermier avant de l'épouser.
- C'est vrai j'oubliais
Alors Charlotte, bouleversée, s ' agenouilla au pied de
son fils et lui cria :
- Allons, je t'en prie ! Dieu nous entendra, j'en suis sûre
crois-moi !
- Voyons maman relève-toi ! Que fais-tu ? Je t'en prie
maman, calme-toi !
- Pense à ton père Le pauvre Tu sais que je ne peux
pas aller à Saint Jacques de Compostelle toute seule ;
je dois être accompagnée d'un homme !
- Très bien, maman, je te le promets : NOUS IRONS A SAINT
JACQUES DE COMPOSTELLE !
- Merci mon fils, merci ! »
Jacques se pencha alors vers sa pauvre mère, tous deux
pleurant toutes les larmes de leur corps, et l'embrassa sur le
front. Il l 'aida alors à se lever et la fit asseoir sur
une chaise :
« Très bien maman, nous devons tout préparer.
Je vais, tout d'abord, aller voir tante Sophie et lui demander
son aide, comme nous en avons déjà parlé
- Très bien, et moi, pendant ce temps, je rassemblerai
des provisions, des couvertures et tout ce qu'il nous faut.
- Oui, nous nous renseignerons alors sur la route à prendre
et nous pourrons partir !
- Oh oui, mon fils, pour demander grâce à Dieu pour
ton pauvre père
- C'est cela maman »
Jacques embrassa ensuite la main de sa mère et il partit
à Aix-en-Provence, voir la tante Sophie pour lui demander
son aide. Quand à Charlotte, elle se précipita sur
son lit et remercia Dieu de lui avoir permis de convaincre son
fils. Elle rassembla alors, des couvertures et de la nourriture.
Le lendemain matin, à l'aube, Charlotte et Jacques partirent
sur la route prévue pour se rendre à Saint Jacques
de Compostelle dans l'espoir que cet acte, en tout cas ils l'espèraient,
aiderait Guy à revenir chez lui.
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