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Le soleil brûlait leurs épaules et des gouttes
de sueur coulaient sur leur front. Les pieds de Charlotte, rouges
de sang des ampoules éclatées , lui faisaient mal,
mais elle continuait à se traîner, un pied devant
l'autre, un pas après l'autre. Elle continuait tandis que
ses mains, brûlées par une irritation, et ses lèvres
gercées lui semblaient être percées d'échardes.
Ils s'arrêtèrent alors sur le bord de la route près
d'une rivière.
« Encore deux jours de marche, dit Jacques, et nous arriveront
à Arles ».
Ils allaient enfin gagner un peu de repos et peut-être aussi
un bon repas. Ils n'attendaient que ca.
Cette nouvelle lui redonna de l'entrain, et Charlotte se retint
de courir à chaque pas.
Ils arrivèrent enfin à Arles. Durant toute une journée,
ils pourraient se reposer et se consacrer principalement à
Dieu. En effet, à Arles, on trouvait une magnifique église.
Cette église avait un type roman.
Charlotte, émerveillée, admira alors l'église,
qu'elle avait attendue depuis une longue semaine. Ses yeux étaient
plein d'admiration pour ce beau monument. Les voûtes du
bâtiment étaient larges et hautes. L'ensemble était
d'un brun gris foncé. Quand elle entra dans l'église,
elle vit que les vitraux étaient d'une largeur colossale.
Tous les chapiteaux de pierre, sculptés soigneusement et
avec délicatesse, montraient la triste mais merveilleuse
histoire du Christ. De belles peintures couvraient le fond rond
et courbé, montrant les activités d'une vie comme,
Charlotte pensa, la sienne. Des chaises en bois étaient
placées, en rangs soignés, devant l'autel.
Elle s'assit alors sur une de ces nombreuses chaises et commença
à prier. Elle pria pour le bonheur et la santé de
son fils, elle pria pour leur arrivée à Saint-Jacques
de Compostelle, elle pria pour les amies qu'elle avait laissées
derrière elle, à la ferme, et qui avaient proposé
d'aider la tante Sophie. Mais elle pria surtout pour son mari,
perdu dans la mer ou dans une forêt lointaine ou encore
des lieux auxquels Charlotte ne voulait pas songer.
Son fils et elle allèrent ensuite à une taverne
ou ils se régalèrent d'un dîner de roi. Ils
mangèrent de la soupe avec du buf, du pain frais et eurent
même du vin rouge. Comme elle et Jacques ne pouvaient dévorer
tout ce qu'ils avaient acheté, Charlotte mit le pain et
les restes du buf dans son sac.
En sortant dans la rue, elle vit des rayons de soleil chaud rebondir
sur un vieil homme. On aurait dit qu'il allait mourir de faim
et Charlotte, voulant absolument l'aider, lui tendit les restes
de son déjeuner.
« Merci » était tout ce qu'il put dire car
son corps tomba lentement à terre, ses yeux se fermèrent
et sa main lâcha le précieux cadeau. Affolée,
Charlotte, courut dans l'église d'où elle ramena
un prêtre. Le clerc était beau, pas beau physiquement,
mais il avait un beau cur ; sans attendre, il porta le corps du
malheureux dans l'église, malgré ses pauvres épaules
sans force. Il monta trois séries d'escaliers. Charlotte
le suivait toujours. Ils étaient arrivés dans une
pièce aux murs beiges, chargés de croix religieuses
et de pages, écrites à la main, apparemment recopiées
de la Bible.
Le prêtre posa le corps inanimé sur un lit et l'ausculta
attentivement. Après quelques minutes il se leva, sortit
de la pièce et revint quelques minutes plus tard, chargé
d'une bassine d'eau fumante et d'une serviette blanche. Il commença
à éponger le front du malade et dit à Charlotte
:
« Mon enfant, réalises-tu que tu viens de sauver
la vie d'un homme ? »
Charlotte, heureuse de savoir que l'homme se portait bien, tendit
le pain au prêtre et lui dit :
« Mon père, veuillez donner ce bout de pain à
cet homme quand il se réveillera, s'il vous plaît
- Je n'y manquerai pas mon enfant Va en paix, maintenant.
- Merci. »
Charlotte redescendit alors les escaliers et retrouva son fils
toujours en train de prier dans l'église.
Charlotte et Jacques continuèrent alors leur chemin, se
dirigeant vers Montpellier, où il trouverait abris dans
une université populaire : l'université de médecine.
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